samedi 1 octobre 2016

parce qu'il y a le vertige

peinture Nicolas de Stael




Parce qu’il est inquiet. Parce qu’il a le vertige. Parce que c’est la nuit. Parce que l’étrangeté de tout est tellement étrange que tout ce qu’on peut dire ne dit rien. C’est comme écrire le mot galaxie. Puis écrire le mot Treblinka. Les mots évoquent des images, provoquent des sentiments. Mais pour les sentiments il n’y a plus de mots. Quand je dis vertige, je ne dis pas grand-chose. Le vertige galaxie. Le vertige Treblinka. Ce sont des vertiges qui font tomber dans le silence. Le vertige, c’est l’angoisse de la chute et l’attirance de la chute. À l’extrême de la peur de tomber on se laisse tomber pour conjurer, sinon anéantir la peur de tomber. Et au bout de la chute, c’est le silence. On amoncelle des mots et des phrases par angoisse du silence. Je parle par angoisse de me taire. Je trace des mots par angoisse d’être muet… Satisfaction de l’enfant qui avec ses crayons de couleur vient de dessiner une maison, il montre son dessin et dit : voilà, j’ai dessiné une maison. Le vieux Picasso, lui, dessinait des jeunes femmes, et n’oubliait jamais de représenter les poils, vulve et anus. Fascination. Tracer ce qu’on voit.


LE RESSAC DU TEMPS
LE MURMURE DU MONDE / 5
à paraître aux éditions des Vanneaux



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